René PATRON
François CHAUVIN















Parcelles d'infini de Patricio Rojas San Martin

Chaque oeuvre de René Patron est une invitation à voyager ; au loin, vers d'autres horizons, mais aussi vers l'intérieur, vers les recoins les plus enfouis de notre conscience.
L'observateur non averti peut être dérouté, décontenancé face au travail de René. Pour moi, il ne s'agit pas de me planter devant l'oeuvre, mais d'aller dedans. Si nous voulons voir, il faut rentrer dans le décor, tel un petit avion qui irait se poser dans un champ. L'atterrissage peur être accidenté, achotant, approximatif ; mais une fois que nous mettons le pied dessus, d'observateurs nous devenons acteurs. C'est nous qui prenons les manettes, qui déterminons la direction à prendre. Nous passons du rôle de témoin à celui de conducteur. Nous rentrons dans un monde que nous avions poussé dehors ; le monde de l'enfance, celui où il n'y avait pas de frontière entre le rêve, le jeu et la réalité. Aussi, lorsque je m'introduis, en explorateur, dans l'univers d'une toile, il y a des barrières qui sautent dans mon esprit. J'y viens pour m'amuser, pas pour coller des étiquettes, ni pour classer ce que je perçois dans des cases pré-établies.
Entendons-nous bien. Je ne dis pas qu'il faut aborder l'art en laissant la réalité dehors ; pas du tout.
Dans cette invitation au voyage proposée par René Patron, il faut s'armer de jeu et de rêve, ainsi que de réalité et de raison. Pour les dépasser, les recréer. Il ne s'agit donc pas d'évasion, ni de négation, mais d'utilisation concertée de nos moyens de perception.
Ce double voyage -intérieur,extérieur- soustend également une autre dualité : l'infiniment grand, le grand espace ; et le démesurément petit, le microscopique. D'un côté l'univers ; l'individu de l'autre côté. L'océan peut devenir une goutte d'eau au coin de la paupière, puis s'évaporer, s'envoler, comme la vapeur dégagée par la tasse de café que je tiens à la main. Hum... ça sent bon ! Ensuite, cela se transforme en un gros nuage épais. Attention, une tempête se déchaîne, des éclairs font irruption. Brusquement j'atterris au Désert du Sahara ; l'instant d'après cela devient un grain de sable dans la paume de la main. Peut être l'empreinte de l'univers tout entier se retrouve là, miniaturisée, au coeur de ce grain de poussière.
Voilà donc que chaque toile me permet de voyager, de contempler à la fois ce que -extrêmement loin- je suis incapable de regarder à l'oeil nu ; et ce que -extrêmement proche- je ne parviens à discerner autrement que grâce à un artifice (miroir, loupe ou psychanalyse...)
Grâce au travail de l'artiste, la vaste étendue du ciel est à ma portée, mais aussi les nuances de la pigmentation d'un bout de pétale d'hortensia. Une exposition de René Patron est pour moi plusieurs aller-retour assurés. Voyage cosmique, inter-galactique, ainsi que voyage au coeur de la matière.
Chaque oeuvre est comme un bassin dans lequel je peux plonger. J'y suis à l'aise. La température y est agréable. J'y suis en paix, en communion avec moi-même en prenant ces bains de couleurs qui viennent mettre en valeur les lignes de mes sens et les formes de ma pensée. Dans ces plongeons je retrouve à la fois des lambeaux de ma mémoire, ainsi que des visions de mon avenir.
Ces lucarnes, ces invitations au voyage, s'ouvrent comme des fenêtres. Ce sont des sortes de téléscopes et microscopes à la fois, grâce auxquels nous accédons à des "Parcelles d'infini".
A travers ses travaux, René Patron nous donne à respirer. Il restitue pour nous un domaine profond et enfoui ; celui de l'innoncence et de la complexité ? Je ne le sais pas. Je ne suis ni critique d'art ni sociologue. Mais je sens qu'il nous transmet un souffle essentiel.










Semaine 44 (du 28 Octobre au 02 Novembre 2014)

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